L’assemblée générale des pépiniéristes viticoles de Gironde s’est déroulée le 12 décembre à Beychac-et-Caillau. Si la profession travaille à une démarche d’amélioration continue, elle constate que l’administration lui demande d’assurer par elle-même les opérations de contrôle qui lui incombait jusque-là.
« A ce rythme, on va passer plus de temps dans nos bureaux que dans la pépinière », constatait un pépiniériste viticole.
« On ne peut changer un mode de contrôle vieux de plusieurs dizaines d’années en quelques mois. Nous, la filière des pépiniéristes viticoles, nous sommes inquiets ! » David Amblevert, coiffé de sa casquette de président de la Fédération française des pépiniéristes viticoles, intervenait jeudi 12 décembre lors de l’assemblée générale régionale. Et ne masquait pas sa préoccupation devant les représentants des administrations.
Le contexte est le suivant. L’Europe, dans une volonté d’unité, demande à ce que des règles communes sur la « santé du végétal » s’appliquent à l’échelle des 27 pays. Sur le fond, la demande est légitime. Sur la forme, la France semble avoir confondu vitesse et précipitation. « Cela fait cinq ans que l’Italie se prépare à ce changement, souligne David Amblevert. La France a sorti ce texte cet été. » Et le 16 décembre, l’ensemble des pépiniéristes français deviennent des opérateurs professionnels agréés (OPA). Cette obtention est remise sur la table tous les ans.
« Pas de surenchère administrative ! »
Le pépiniériste doit justifier d’un travail de vérification de ses plans contre les maladies graves susceptibles de quarantaine (flavescence dorée et xylella fastidiosa), et transmettre au laboratoire les plantes sur
lesquelles il peut avoir des doutes.
Globalement, ce qui se dessine est clair : l’administration réduit ses effectifs et demande à la filière de se prendre en charge dans sa politique de contrôle des parcelles de vignes mères et d’assurer une très forte
traçabilité. La démarche lancée par Vitipeps épouse déjà, par son cahier des charges et sa prospection, ce qui est demandé. « Mais personne ne doit rester au bord du chemin », clame Delphine Bougès, présidente du syndicat des pépiniéristes viticoles de Nouvelle- Aquitaine. Demandant à l’administration d’effectuer un travail d’accompagnement : « Nous ne voulons pas être livrés à nous-même », au risque d’être sous les fourches
caudines du zèle réglementaire.
Valérie Laplace, directrice régionale des services de FranceAgriMer a tenu à rassurer les pépiniéristes viticoles : « Soyez confiant, vous êtes dans une filière structurée, et d’un niveau avancé. Et ce n’est pas le cas dans
beaucoup de pays européens. Ayez en tête qu’en ce qui vous concerne, cela ne va pas être la révolution. Oui, vous aurez plus de justificatifs de traçabilité à fournir. Sans doute un peu plus de travail de bureau. Mais l’enjeu, c’est que vous continuiez à être OPA demain. Et tout cela, nous allons vous aider à le construire face aux contraintes réglementaires. »
Même encouragement de Philippe De Guenin, directeur régional de l’agriculture et de la forêt (DRAF) : « Je comprends que vous puissiez être inquiets, et que vous ayez le sentiment d’une filière chahutée. Mais vous êtes la première région en production. Si je devais faire un parallèle avec le sport, c’est comme si on vous demandait de sauter 1,20 mètre quand vous savez sauter 1,50 mètre. Je tiens à vous dire que nous ne sommes pas là pour vous freiner ! »
Dans la salle, un pépiniériste s’inquiète malgré tout : « A ce rythme-là, le temps que l’on va passer dans nos bureaux sera supérieur à celui passé dans la pépinière. » Delphine Bougès, attachée « à l’esprit de collectif », qui accueillait avec attention les remarques réconfortantes de l’administration, se voulait pragmatique : « Nous voulons bien être optimistes. Mais dans l’immédiat, nous allons rester prudents. Nous constatons que les services de l’État fonctionnent avec de moins en moins de monde » et que les transferts de charge, en matière de contrôle, vont dorénavant peser sur la profession.
David Amblevert se veut ouvert au dialogue avec l’État, mais dans son rôle de président national signale qu’il fera montre de vigilance : « Il ne faut de surenchère administrative au nom du principe de précaution ! Sinon, il y aura de la casse. Or, tous ensemble, nous sommes et voulons demeurer pépiniéristes. »
■ Emmanuel Danielou