INAO : un dispositif pour stimuler l’innovation en AOC
Le Comité National Vin de l’INAO (CNAOV) qui s’est déroulé en février a défini le cadre d’un nouveau protocole permettant d’innover en matière culturale ou œnologique, tout en conservant le bénéfice de l’AOC. Cette évolution essentielle ouvre le champ des possibles et va permettre aux ODG de répondre aux enjeux du changement climatique comme aux attentes sociétales en s’appuyant sur l’innovation technique. Elle constitue un grand pas en avant pour favoriser la résilience de la viticulture d’AOC.
Dans la continuité du dispositif des VIFA (variétés d’intérêt à fin d’adaptation), qui est de plus en plus largement mis en œuvre en Gironde, le dernier Comité national Vin de l’INAO a approuvé la possibilité d’étendre ces démarches d’expérimentation aux pratiques culturales ou œnologiques. Ces expérimentations se dérouleront selon un cadre bien défini, respectueux des principes des appellations, notamment du lien au terroir.
Les nouvelles orientations politiques seront traduites dans une directive qui devrait être validée lors du Comité national du mois de juin 2023, après avis des comités régionaux (CRINAO) au cours du printemps. Pour Bernard Engelras, président du groupe de travail « scientifique, technique et innovations » du CNAOV : « Avec ce dispositif, l’INAO donne des outils aux ODG pour s’inscrire dans la viticulture du XXIe siècle ».
Les conclusions adoptées par le Comité National introduisent la possibilité de mettre en place, à l’échelle de chaque appellation, un dispositif d’évaluation des innovations (DEI). Il sera ainsi possible d’introduire à des fins d’expérimentation, dans les cahiers des charges des appellations, à petite échelle et pour une durée donnée, des conditions de productions innovantes, pratiques culturales ou œnologiques, dans le cadre d’un protocole de suivi adapté. Ces pratiques seront évaluées pour une période définie dans le protocole.
Le bilan de ces évaluations ainsi qu’une analyse de l’appropriation de ces pratiques à l’échelle de l’appellation permettra, à l’issue de la période prédéfinie, soit d’intégrer la pratique dans le cahier des charges de l’appellation, soit de l’encadrer, soit de la rejeter.
Il est également prévu de multiplier et diversifier pendant la période d’expérimentation le recours aux expertises scientifiques afin de pouvoir suivre l’adaptation de ces pratiques aux enjeux climatiques ou écologiques mais aussi d’évaluer leurs impacts sur les caractéristiques des produits et leur lien au terroir.
Certaines exigences du dispositif ont d’ores et déjà été validées :
- Une accessibilité à tous les opérateurs de l’AOC.
- Une limitation des quantités mises en œuvre et commercialisées, s’inspirant de ce qui a été mis en place pour les VIFA, (5 % des surfaces mises en œuvre, hors zones de non-traitement (ZNT) ou 10 % des volumes après assemblage en vue de la mise à la consommation), mais son ampleur nécessitera une application au cas par cas à partir des spécificités de la condition à évaluer. En tout état de cause, les modalités précises de limitation des surfawces ou des volumes mis à la consommation seront indiquées dans le cahier des charges.
- Un suivi des innovations par un organisme habilité à conduire des expérimentations, désigné par l’ODG.
- Un engagement de l’opérateur à effectuer les observations, mesures et prélèvements définis par le protocole. Pour cela, il signera une convention avec l’ODG et l’INAO.
- Une clause de revoyure. Cette convention fixe notamment la durée de la période d’évaluation et la date de la clause de revoyure où le bilan de l’évaluation sera réalisé et présenté devant les instances de l’INAO. La durée de l’évaluation dépendra de la condition à évaluer.
- Une réversibilité de l’expérimentation. Cette convention prévoit également que l’opérateur accepte de se soumettre aux décisions des instances de l’INAO à l’issue de la période d’évaluation : la condition de production modifiée, si elle n’a pas donné satisfaction, pourra alors être abandonnée sur décision du Comité National et après avis de l’ODG.
D’ici au Comité national de juin prochain, des exigences complémentaires devront être précisées, comme le nombre maximal d’innovations pouvant être introduites par cahier des charges.
Ce dispositif nouveau reposant sur l’innovation à l’initiative des professionnels constitue un pas en avant très important pour moderniser le concept d’appellation et lui permettre de s’adapter aux évolutions climatiques comme aux attentes des consommateurs.